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Cosmétiques : 5 familles de substances chimiques controversées

Cosmétiques : 5 familles de substances chimiques controversées

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Vous scrutez attentivement les listes d’ingrédients de vos pots de crème et de vos flacons de shampooing ? Voici quelques pistes pour déceler les grandes familles de substances chimiques controversées, à la fois pour notre santé et pour l’environnement.

Sur le banc des accusés, voici cinq grandes familles de substances chimiques. Tout d'abord, les ingrédients qui concentrent la plupart des préoccupations sont les conservateurs et les filtres UV, car leurs potentiels effets sanitaires ne sont pas immédiats et donc invisibles à court terme. Le doute persiste pour une utilisation sur le long terme. Quant aux parfums et aux sulfates, leurs effets immédiats sur la santé permettent de rapidement identifier les produits qu’on ne supporte pas et d’en changer. Enfin, les silicones sont accusés de contribuer à la pollution des écosystèmes marins et plus généralement de l'environnement. 

Bien ou Bien vous a concocté un petit tour d'horizon de ces ingrédients pas toujours sympa, à déceler sur les étiquettes...

Les conservateurs

C’est le sujet de discorde de la cosmétologie, car il n’y a pas un seul conservateur qui fasse l’unanimité, que ce soit en cosmétique bio ou conventionnel. Les conservateurs sont utilisés pour lutter contre le développement fongique (autrement dit : les moisissures !) et bactérien. Selon les conservateurs utilisés, certains sont suspectés de mimer l’action d’hormones, d’autres peuvent entraîner une réaction allergique. 

Dans la famille des conservateurs, même si les parabènes ne sont pas interdits, ils sont réglementés. Leur concentration dans les cosmétiques ne doit pas dépasser 0,4% du poids total du produit (0,8% s’il y a plusieurs parabènes). Face à une méfiance grandissante, de plus en plus de produits affichent la mention “sans paraben”.

Pour les remplacer, on trouve le triclosan (limité à 0,3% en poids total du produit) et le phénoxyéthanol (limité à 1%). Mais ces deux substances ont également soulevé de nombreuses interrogations quant à leurs potentiels effets de perturbateurs endocriniens. En conséquence, leur concentration dans les cosmétiques a été revue à la baisse.

Enfin, comme les parabènes ne sont pas interdits mais réglementés, vous pouvez toujours en trouver sous plusieurs dénominations. Le benzylparaben équivaut à l’hydroxybenzoate de benzyle... Le pentylparaben, c'est la même chose que l’hydroxybenzoate de pentyle, etc. En effet, chaque substance chimique possède un identifiant unique (pour le benzylparaben, n°CAS : 94-18-8), ainsi qu’un nom reflétant sa formule chimique (benzyl 4-hydroxybenzoate) et une ou plusieurs dénominations communes (benzylparaben = hydroxybenzoate de benzyle).

Vu comme le candidat idéal des conservateurs pour s’affranchir du potentiel risque sur le système hormonal, la famille des isothiazolinones a largement été plébiscitée par les industriels. Repérable par ces deux substances : methylisothiazolinone et methylchloroisothiazolinone, cette famille de composés chimiques est malheureusement à l’origine de nombreuses réactions allergiques. L’Anses, l’Agence de sécurité sanitaire, a publié un avis visant à réduire leur utilisation. 

Les autres conservateurs qui peuvent être utilisés dans la formulation de cosmétiques, sans susciter d’inquiétudes, sont les alcools (alcohol denta., benzyl alcohol, cetyl alcohol...) et acides (benzoic acid, salicylic acid, citric acid…). Seraient-ils la solution miracle ? Toujours pas, ces composés chimiques entraînent un assèchement de la peau et peuvent finir par l’irriter plus ou moins sévèrement. 

La formulation d’un cosmétique fait donc appel à plusieurs conservateurs afin, d’une part, de répondre à la réglementation, qui limite les concentrations de chaque ingrédient, et, d’autre part, d’assurer une bonne tolérance pour la peau. Actuellement la seule façon de se passer de conservateur est de se tourner vers des cosmétiques fraîchement formulés ou des cosmétiques solides. Sans milieu humide, pas de développement microbien ! 

Les filtres UV

Essentiels dans la formulation des produits solaires, les filtres UV protègent la peau contre les UVA/UVB, afin de prévenir l’apparition des cancers de la peau. Les UVA et UVB sont capables d’endommager l’ADN (on dit qu’ils sont génotoxiques) et peuvent induire les mécanismes de cancérogénèse, sans qu’il y ait nécessairement de coups de soleil au préalable. Les UVB sont également bénéfiques pour l’organisme car ils contribuent à la synthèse de la vitamine D, essentielle pour le corps.

Pour s’en prémunir, on peut bien sûr limiter son exposition au soleil ainsi qu’utiliser une protection solaire avec un indice adapté à son type de peau : faible protection (FPS 6 à 10), protection moyenne (FPS 15 à 25), haute protection (FPS 30 à 50), très haute protection 50+). Le Facteur de Protection Solaire (FPS) indique le niveau de protection contre les UVB, il est déterminé par la norme internationale ISO 24444. Même avec la protection la plus élevée, aucun produit solaire ne peut garantir une protection intégrale.

D’autant plus que c’est davantage l’application en quantité suffisante et le renouvellement fréquent qui déterminent l’efficacité d’une crème solaire plutôt qu'uniquement le FPS. En effet, un FPS 15 absorbe déjà 93 % des rayons UVB, un FPS 30 en absorbe 97% et un FPS 50 absorbe 98% des UVB. Les recommandations de la Commission européenne mettent l’accent sur la quantité qui doit être utilisée, soit en moyenne pour un adulte, l’équivalent de 6 cuillères à café de crème solaire pour tout le corps. 

Une main qui applique de la crème solaire sur un bras
iStock.com/lovelyday12

Les crèmes solaires font appel à deux types de filtres ultraviolets : les filtres minéraux ou les filtres organiques. 

  • Les filtres minéraux 

Deux sont autorisés par le règlement européen sur les cosmétiques : le dioxyde de titane et l’oxyde de zinc. Ce sont également les seuls autorisés par les labels de cosmétiques bio. 

Les filtres minéraux agissent comme un miroir contre lequel les UV vont être réfléchis. L’inconvénient est qu’ils laissent une fine couche blanche sur la peau. Alors, pour pallier cet effet, les écrans minéraux peuvent être présents dans leur forme nanoparticulaire pour faciliter la dispersion sur la peau et éviter l’effet couvrant. Cette formulation est repérable dans la liste INCI grâce à la mention : dioxyde de titane [NANO] ou oxyde de zinc [NANO].

Le risque concernant les nanoparticules est encore mal appréhendé par la science. Par leur taille, on sait qu’elles peuvent passer toutes les couches de l’épiderme et du derme pour se retrouver dans l’organisme et être dispersées par la circulation sanguine. Quant à leurs effets, on suspecte des phénomènes inflammatoires.  

  • Les filtres organiques

Ce sont les plus utilisés, car ils sont faciles à appliquer et pénètrent bien dans la peau. Une vingtaine est autorisée par le règlement européen (annexe VI), avec systématiquement une concentration maximale à ne pas dépasser dans les produits. Les plus communs identifiables dans la liste d'ingrédients (liste INCI) sont : homosolate (concentration maximale 10% dans le produit fini), benzophénone (concentration maximale 10% dans le produit fini) et octocrylène (concentration maximale 10% dans le produit fini). 

Les filtres organiques absorbent les rayons ultraviolets en lieu et place de la peau. Toutefois, leur côte de popularité est en baisse, car ils sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. En tête de liste, on retrouve le benzophénone, pour lequel en 2011 déjà l’Agence française de sécurité sanitaire recommandait d’abaisser la concentration maximale d’utilisation à 6% dans le produit fini (au lieu de 10%) et de ne pas l’utiliser dans les protections solaires pour les enfants. En mars 2021, UFC-Que Choisir relayait une étude scientifique qui mettait en évidence que l’octocrylène se transformait, en vieillissant, en benzophénone, d’où la nécessité de respecter le délai d’utilisation indiqué sur le flacon après ouverture.

Les ultraviolets, classés cancérogènes avérés, sont face à des filtres UV organiques suspectés d’être des perturbateurs endocriniens : en raison de la balance bénéfices-risques, ces filtres restent autorisés. 

Pour se protéger des rayons du soleil, il n’y a pas une seule solution parfaite mais plusieurs solutions possibles, à adapter selon les activités : éviter les heures d’ensoleillement les plus fortes (11h-16h), porter un chapeau (qui couvre la nuque et les oreilles), se couvrir les bras et les jambes avec des vêtements en toile légère, adopter un t-shirt anti-UV et privilégier les crèmes solaires les moins controversées. Enfin, quel que soit le type de filtre UV, les crèmes solaires sont malheureusement un facteur de dégradation des écosystèmes marins. 

Les parfums 

Les substances odorantes constituent une famille d'ingrédients problématiques, car ils sont responsables de nombreuses réactions allergiques. 

Les cosmétiques mis sur le marché ne doivent pas intentionnellement générer de réaction allergique. Néanmoins, selon sa sensibilité propre, en particulier si on a une peau dite réactive ou atopique, certaines substances chimiques peuvent entraîner une réaction immunitaire disproportionnée : l’allergie. 

Le règlement européen n°1223/2009 a identifié 26 substances fréquemment utilisées comme parfum et pouvant induire une réaction allergique. Ces substances doivent obligatoirement apparaître dans la liste INCI. Si le nom précis n’est pas indiqué, la mention “parfum, fragrance” doit au moins être présente.

Les plus utilisées sont le limonène, le géraniol, le citronellol et le cinnamal. Elles sont toutes les quatre naturellement présentes dans les huiles essentielles d’agrumes, de géranium et de cannelle. Qu’elles soient d’origine naturelle (extraction de la plante) ou d’origine synthétique (recréées en laboratoire), elles génèrent les mêmes effets. 

Pour les éviter, il est judicieux de s’orienter vers des produits “sans parfum”. 

Les sulfates 

Principalement utilisés dans les gels lavant et les shampoings, la famille des sulfates peut entraîner des phénomènes d’irritation localisée, plus ou moins sévère selon votre sensibilité. Dans la liste INCI, on peut les identifier par leurs noms : Sodium Laureth Sulfate, Sodium Lauryl Sulfate, Ammonium Lauryl Sulfate, Sodium Coco-Sulfate...

Les sulfates sont des tensioactifs, autrement dit des émulsionnants. Grâce à leur double propriété de fixer les corps gras et de fixer les molécules d’eau, ils accrochent les saletés pour les éliminer avec l’eau. Sans tensioactif, les corps gras et l’eau ne se mélangent pas.  

Bien que certains sulfates restent autorisés en cosmétique bio, comme le Sodium Lauryl Sulfate et l’Ammonium Lauryl Sulfate, car ils sont biodégradables et leurs procédés de transformation ne nuisent pas à l’environnement, d’autres tensioactifs plus doux pour la peau peuvent être utilisés. 

Les alternatives les moins irritantes, sont les tensioactifs de la famille des acylglutamates (Sodium cocoyl glutamate, Sodium Lauroyl Glutamate...) et la famille des alkyglucosides (Decyl Glucoside, Lauryl Glucoside…). À la fois moins moussants et plus coûteux à produire, ils font grimper le prix des cosmétiques en laissant l’impression d’une efficacité moindre.  

Les silicones

Ces dérivées de silicium sont des composés de synthèse. Elles ont de multiples usages qui en font des incontournables des cosmétiques. Facilitant la bonne répartition du produit sur l’ensemble du corps, avec son pouvoir “glissant”, on les retrouve dans les crèmes (dont solaires), les shampooings ou encore les rouges à lèvres. 

Dans les produits capillaires, les silicones enrobent le cheveu pour lui donner un effet de brillance et une douceur au toucher. Dans les crèmes de soin, elles ont pour rôle de repulper, de tonifier la peau, en masquant les ridules. Peu problématiques pour la santé, l’inquiétude concerne leur contribution à la pollution des océans, car ce sont des éléments non biodégradables. 

Elles sont repérables par leur terminaison en “-one” et “-xane” et les plus utilisés sont : Diméthicone, Cyclopentasiloxane, Cyclohexasiloxane… 

Absentes des formulations certifiées bio, si vous changez de shampooings, vos cheveux auront besoin d’un temps d'adaptation et pourront paraître ternes et rêches après les premières utilisations. Alors, persévérez ! 

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À propos de l'autrice
Elodie Lapierre
Rédactrice spécialisée en santé environnementale
Titulaire d’un Master Méthodes de Recherche en Environnement, Santé et Toxicologie, Elodie a à cœur d’informer et de sensibiliser aux idées reçues afin de permettre à chacun et chacune de faire des choix éclairés.
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