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Plus de transparence : l'heure de la fashion revolution a sonné

Plus de transparence : l'heure de la fashion revolution a sonné

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Se tourner vers des enseignes plus éthiques, très bien. Mais comment par ailleurs faire bouger les lignes pour renverser le modèle de la fast fashion ? Pourquoi ne pas directement interpeller les marques, les inciter à être plus transparentes ? Voici ce à quoi œuvre notamment le collectif Fashion Revolution, né à l’initiative des créatrices britanniques de mode éthique Carry Somers et Orsola de Castro.
L’équipe de Fashion Revolution/ ©Georges BAUR

[Cet article a été initialement publié dans le guide IDÉES PRATIQUES #3: La mode éthique dans nos dressings, réalisé par ID L'Info Durable.]

Qui ne se souvient pas de la catastrophe du Rana Plaza, le 24 avril 2013 ? Nous sommes à Dacca, au Bangladesh, et l’effondrement d’un immeuble d’ateliers de confection textile va causer la mort de 1138 personnes, tandis que 2500 autres seront blessées. L’origine du drame ? Des fissures dans le bâtiment, signalées depuis des mois par les travailleurs et non-prises en compte. Une véritable catastrophe industrielle à l’échelle mondiale vient de se produire. Au Royaume-Uni, un vaste mouvement va alors se créer.

Carry Somers et Orsola de Castro décident de lancer sur Instagram le hashtag #WhoMadeMyClothes, demandant à leurs proches de se photographier avec l’étiquette d’un vêtement et d’interpeller la marque de celui-ci pour en savoir plus sur son origine. L’initiative cartonne. En 2014, à l’anniversaire du 24 avril, va naître officiellement Fashion Revolution, un collectif axé sur la défense des droits des travailleurs à l’international et sur la demande de transparence des marques. Ce collectif compte huit grands bureaux dans le monde, dont un en France, et plus de 80 pays ont également des équipes investies dans le mouvement.

Quand révolutionner la mode passe par... l’éducation

Le bureau français de Fashion Revolution suit les guidelines du Royaume-Uni et mène également sa propre action : du lobbying et de l’accompagnement auprès des entreprises, des partenariats avec des écoles de mode et des universités pour faire de l’éducation auprès des jeunes générations, qui vont faire le monde de demain... L’idée est d’aller vers une mode plus transparente, mais aussi plus pratique. "Il faut aussi avancer sur les lois internationales, remarque Catherine Dauriac, présidente et coordinatrice de Fashion Revolution France. Le harcèlement sexuel est monnaie courante dans les usines, nous avons par exemple fait une campagne en mars sur l’égalité des genres et sur le harcèlement sur les lieux de travail".

Chaque année est par ailleurs organisée - à l’échelle mondiale - la Fashion Revolution Week, dans la semaine qui entoure la date du 24 avril : des événements live, des conférences avec tous les acteurs d’une mode plus responsable, des ateliers de réparation de vêtements... Parmi les gros enjeux sur lesquels travaille Fashion Revolution France, il y a bien sûr, entre autres, celui de nos propres habitudes de consommation. "J’ai eu 20 ans dans les années 80 et nous avions tous à l’époque trois pantalons, quatre robes, cinq tee-shirts, deux manteaux", se souvient Catherine Dauriac. Aujourd’hui, la présidente déplore trop de publicités, de nouvelles collections qui arrivent toutes les semaines dans les enseignes de fast fashion... "Nous sommes huit milliards d’humains, 100 milliards de vêtements sont produits tous les ans !"

Vers plus de transparence

Face à ce constat, l’éveil des consciences a été long. Si le drame du Rana Plaza a tristement marqué les esprits quant aux conditions précaires de nombres de travailleurs de la mode, la véritable prise de conscience de la population ne se fait ressentir véritablement que depuis 2018, d’après Catherine Dauriac : "Il y a eu cette phrase choc, ‘la mode est la deuxième industrie la plus polluante au monde’, qui est d’ailleurs une fake news ! C’est l’une des industries les plus polluantes au monde, dans le top 3 ou 4, pas la deuxième. Mais en tout cas, ça a eu un effet bœuf. Quand on réalise que trois quarts des vêtements sont fabriqués en Asie, que les deux tiers de nos tissus sont en polyester, donc du pétrole, que sinon ils sont faits en coton, ce qui représente 25 % des pesticides mondiaux..."

Selon la présidente, de grandes maisons se sont senties mal à l’aise face à cette phrase choc et ont décidé de travailler un peu mieux sur leur RSE et leur transparence. "Nous avons un index de transparence des marques et nous avons remarqué en cette année 2020 plus de transparence dans les documents disponibles au public"... Ce qui, d’après Catherine Dauriac, ne veut toutefois pas dire "durabilité" : "Mais c’est déjà un pas vers plus de sustainability !"

Gare au greenwashing

Nombre d’enseignes seraient ainsi en train de remplir leurs sites Internet avec leurs bonnes pratiques RSE, de raconter où sont fabriqués leurs vêtements... Mais Catherine Dauriac remarque que souvent, tout n’est pas dit. Et surtout, qu’il n’y a jamais eu autant de greenwashing. "J’ai été très choquée, pour la journée internationale des droits des femmes, de voir mis en avant un tee-shirt Dior ‘We should all be feminists’ , à 620 € ! Utiliser des slogans féministes ainsi, c’est pire que du greenwashing, c’est se moquer des gens. C’est insupportable. Il faut arrêter de prendre les vrais sujets de société pour en faire du profit !", dit-elle.

Heureusement, la présidente du bureau français de Fashion Revolution dit voir également beaucoup d’innovations, de petites entreprises qui se montent autour de la réparation de vêtements, de l’upcycling, avec un modèle de proximité et un véritable savoir-faire : "À mon avis, c’est l’avenir. Je suis confiante car il n’y aura pas le choix. Il va y avoir une telle crise économique mondiale que les marques de fast fashion vont commencer à fermer leurs boutiques". À voir si l’avenir donnera raison à la fashion revolution...

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