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Les bioplastiques, une poudre aux yeux ?

Les bioplastiques, une poudre aux yeux ?

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Que recouvre le terme bioplastique ? Ces matières sont-elles réellement vertueuses ?
Photo by Mae Mu on Unsplash

[Cet article a été initialement publié dans le guide IDÉES PRATIQUES #9 : Comment vivre sans plastique ?, réalisé par ID L'Info Durable.]

Qu'est-ce qu'un bioplastique ?

Ils n’ont de bio que le nom. Dans la même évaluation du PNUE ce dernier mois d’octobre, les auteurs mettent en garde "contre les alternatives néfastes aux produits à usage unique et autres produits en plastique, comme les plastiques biosourcés ou biodégradables, qui représentent actuellement une menace chimique similaire à celle des plastiques conventionnels". En effet, à première vue, les bioplastiques ont tout pour plaire. Mais, "c’est un terme très flou", estime Théo Céraline de Zero Waste France. On en distingue deux types, cités par l’ONU, les biosourcés et les biodégradables/compostables. Pour les premiers, la biomasse remplace le pétrole à la conception. Quant aux seconds, ils promettent de se dégrader dans l’environnement à la fin de vie. En clair, un bioplastique n’est pas nécessairement biodégradable, ni biosourcé.

Quelles conditions, quelles compositions ?

Du côté de la catégorie biosourcée, la matière première est donc issue de la biomasse. Elle est ainsi naturelle et renouvelable : la canne à sucre, le blé, le maïs, la pomme de terre, la betterave comptent par exemple parmi les ingrédients convoités pour remplacer les sources fossiles.

En revanche, malgré le terme "bio", rien ne certifie que celles-ci soient cultivées dans une démarche d’agriculture raisonnée, impliquant ainsi de potentiels pesticides, engrais et autres produits chimiques. Enfin, un plastique biosourcé ne l’est pas nécessairement à 100 % et peut alors être mélangé à d’autres formules "classiques", de source fossile. Quant aux terres cultivées, elles sont pour la plupart dédiées exclusivement à la fabrication de plastique biosourcé. La part de surface utilisée en ce sens est encore très faible puisqu’elle représentait en 2019 0,016 % des terres arables selon le lobby européen European Bioplastics.

Quid de la seconde catégorie ? Les plastiques dits compostables sont pour leur part soumis à une norme européenne qui impose entre autres que ceux-ci se décomposent en humus à 90 % minimum sous six mois dans des conditions de compostage industriel. Mais ces conditions ne sont en aucun cas semblables à celles de la nature. Ce type de déchet, jeté dans l’environnement, ne se dégraderait donc pas de la même façon. De même, le compostage industriel n’est pas non plus similaire au compostage domestique que l’on pratique dans son jardin. Jeter son sac en plastique compostable dans son bac à compost à la maison serait donc une mauvaise idée. Quant à ceux que l’on définit comme "biodégradables", le terme est trop flou : en France, l’apposition de cette mention sur les produits est ainsi interdite.

Quels problèmes ?

Pour l’heure, les bioplastiques en sont toujours à leur balbutiement, puisqu’ils représentent moins d’1 % du marché total. Qu’il s’agisse de disponibilité des ressources ou de fin de vie, ils se heurtent aujourd’hui à des obstacles qui risquent de poser problème si ceux-ci tendaient à se développer.

  • Les matières premières utilisées pour les plastiques biosourcés sont certes renouvelables, mais pas nécessairement biologiques, ni raisonnées, pouvant ainsi poser question en termes de gestion des ressources, d’utilisation d’engrais ou pesticides, de disponibilité des récoltes... La canne à sucre est par exemple cultivée très loin de l’Europe dans des zones tropicales et nécessite beaucoup d’eau et de produits chimiques. En outre, la question des terres arables pourrait être également soulevée si l’option biosourcée se développait à plus grande échelle. Puisqu’un champ de blé cultivé pour fabriquer du plastique est toujours un champ de moins pour nourrir les hommes et les animaux.

  • La part de matière biosourcée peut-être minoritaire par rapport à la part de matière première issue de source fossile. Cela n’empêchera en rien d’apposer la mention "plastique biosourcé" sur le produit. Sur le territoire, la loi AGEC prévoit d’imposer au minimum 60 % d’origine végétale dans les compositions de plastique biosourcé d’ici 2025.

  • Concernant les plastiques dits compostables, bien que soumis à quelques exigences législatives, dans les faits, ces termes ne signifient pas que ces déchets puissent être jetés dans la nature sans conséquence. Rien ne spécifie alors le degré et la vitesse de dégradation dans différents environnements. Enfin, lorsque la mention "OK COMPOST" est indiquée sur un produit, on peut comprendre que celui-ci peut trouver sa place dans un compost industriel ou parfois domestique... Mais dans le doute, l’ADEME recommande plutôt d’opter pour la première option puisque les conditions sont bien différentes de l’un à l’autre.

  • De ce côté-là également, le compostage industriel présente un surcoût qui le désavantage par rapport à l’incinération de ces déchets. Le recyclage, déjà complexe pour les plastiques "classiques", est d’autant plus difficile pour les biodégradables. Principal frein : la collecte est trop peu développée, laissant ainsi ces déchets finir leur vie en décharge.

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